Nouveaux Cahiers du socialisme 32

Le racisme est une forme de violence qui affecte profondément des millions de personnes qui en souffrent chaque jour à travers le monde, que ce soit dans leur environnement professionnel, au sein des transports en commun ou dans d’autres sphères de la vie quotidienne. Cette violence, vécue de manière individuelle, s’inscrit dans un cadre plus large de discrimination, où l’accès aux droits et aux opportunités est inégalement réparti. Ce système de différenciation sociale, fondé sur des rapports sociaux de domination et naturalisé par des critères physiques et culturels, plonge ses racines dans la longue histoire du colonialisme, de l’impérialisme et de son étroite relation avec le capitalisme.

L’ampleur du colonialisme fut telle qu’au début du XXe siècle, plus de 80 % des régions du monde avaient été ou étaient encore des colonies de pays occidentaux. Les bouleversements produits par cette réalité ont profondément transformé les relations entre les peuples, les groupes racisés et les régions à l’échelle mondiale, en établissant de force une hiérarchie où le monde occidental se situait au sommet d’une pyramide sociale qui a déterminé et continue de déterminer la vie de millions de personnes. L’héritage matériel et symbolique du colonialisme se manifeste encore aujourd’hui dans la manière dont nous nous percevons, dont nous interagissons et voyons le monde qui nous entoure, perpétuant et exacerbant les stéréotypes, les haines et les violences issues de cette rupture sociale. 

Des événements tels que la mort de George Floyd ou de Joyce Echaquan, l’augmentation alarmante des crimes haineux, ou encore la montée de la haine en ligne nous rappellent l’actualité du racisme. Ces moments de violence sont les échos modernes d’une histoire où la supériorité d’un groupe sur un autre a été justifiée et institutionnalisée par des siècles de colonialisme; une histoire qui n’a pas seulement fondé la fausse idée de « race » et le racisme qui en découle, mais qui continue de nourrir les consciences, génération après génération, rendant difficile leur éradication. Des Palestiniens aux Rohingyas, des Ouïghours aux Autochtones d’Amérique du Nord, les luttes actuelles des communautés qui affrontent les nouvelles expressions du colonialisme et du racisme génocidaire démontrent que les structures coloniales continuent de façonner nos vies, les institutions locales et internationales, ainsi que le capitalisme actuel.

L’objectif de ce dossier est de fournir une compréhension critique des questions raciales et de leur lien intrinsèque avec le colonialisme, l’impérialisme et la modernité, dans le contexte actuel du Québec et du monde. Il constitue un espace de réflexion et de discussion qui invite à une prise de conscience et à une action éclairée face aux structures de violence qui perdurent et qui requièrent notre attention et notre engagement. Dans le cas du Québec, ce dossier ouvre la possibilité de repenser de manière historique et structurelle les relations entre Autochtones, francophones et nouveaux immigrants et immigrantes.